Une vie intègre

De nombreuses personnes en Occident sont intéressées par le zen. Certaines voient dans le zen quelque chose de magique, où il n’y aurait pas d’efforts à faire.

La proposition du zen c’est de vivre sa vie avec intégrité, vivre une vie intègre.

Quand on parle de l’intégrité d’un territoire, l’intégrité veut dire la totalité. D’un point de vue moral, l’intégrité veut dire juste, droit, honnête. Faire les choses intégralement, totalement.

Comment vivre sa vie avec intégrité, sans restreindre, sans altérer l’élan vital ? Vivre totalement, sans ajouter, sans enlever quoi que ce soit.

Quand on se tourne vers la voie de l’Éveil, la voie du Bouddha, il est nécessaire au départ de faire le vœu d’empêcher le mal d’apparaître, en revanche de permettre au bien de se développer, et cela pour le bien de toutes les existences, pas seulement pour soi.

Empêcher le mal d’apparaître demande de ne pas violer les préceptes. Violer les préceptes c’est accepter d’agir avec avidité, avec aversion ou avec stupidité. Dès que vous violez les préceptes, le mal se répand. Comme quand vous jetez une pierre dans la mare, les vagues se répandent. Une fois que vous avez violé les préceptes, à partir de là les vagues de douleur, d’injustice, perturbent la paix de l’univers.

Il est donc très important de ne pas violer les préceptes.

Mais si les préceptes ont été violés et que les vagues de souffrance se répandent dans l’univers, il est alors très important d’accepter ces rétributions.

Dans le zen on dit : « manger le fruit amer de nos erreurs ». Manger le fruit amer, cela veut dire accepter les conséquences qui nous reviennent et ne pas accuser les autres, ne pas blasphémer, ne pas se mettre en colère, ne pas parler d’injustice, juste accepter le fruit amer, manger le fruit amer.

Certaines personnes volent et quand elles sont prises en train de voler, elles mentent, elles deviennent violentes, elles n’acceptent pas de manger le fruit amer, la rétribution des actes erronés qu’elles ont faits, elles n’acceptent pas de « payer » leurs erreurs.

Ne pas accepter les conséquences de nos actes et ajouter à l’infini des erreurs aux erreurs, c’est ce qui amène le monde à la confusion, à la folie.

Ne pas violer les préceptes c’est ce que nous faisons en zazen, et manger le fruit amer de nos erreurs passées, c’est ce que nous faisons en zazen : nous ne bougeons pas devant les pensées, les émotions, tout ce qui apparaît à la conscience.

C’est ce que dit le maître zen à son disciple : « Quand toutes sortes de phénomènes éclatent à la conscience, ne t’en préoccupe pas, ne te débats pas, laisse-les apparaître et disparaître d’eux-mêmes. » Tout ce qui apparaît à la conscience n’est que le fruit de notre karma passé.

C’est comme cela que le premier vœu – empêcher le mal d’apparaître – est réalisé en zazen. Seulement se tenir droit, laissant la respiration se faire librement, laissant les pensées apparaître et disparaître librement, maintenant l’immobilité, le silence et la lumière, c’est-à-dire sans dormir.

Ça c’est le premier pas, incontournable.

Ensuite, planter des graines de bien, permettre au bien de se développer.

Empêcher le mal et permettre au bien de se développer, pour le bien de toutes les existences.

Dans certaines voies, empêcher le mal d’apparaître, c’est-à-dire ne pas violer les préceptes et accepter de manger le fruit amer de nos erreurs, c’est ce qu’on appelle la purification. Accéder à un esprit libre, pur.

On parle aussi, dans le zen, de polir le miroir.

Avec cet esprit clair, avec cette conscience ouverte, on peut voir le monde tel qu’il est, et agir avec intégrité, c’est-à-dire avec une conscience vaste, sans limites, sans souillures. Voir la réalité telle qu’elle est, et répondre à la demande du monde avec un esprit bienveillant, bénéfique.

Quoi qu’il en soit, le premier pas, fondamental, est de polir le miroir, ouvrir sa conscience, voir les choses telles qu’elles sont.

Ce premier pas est incontournable pour mener sa vie d’une façon intègre.

Taiun JP Faure, novembre 2023